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Client dans une chambre d’hôtel à Paris |
J'exerce donc la domination, pour des sessions
allant de 1h à parfois 48h. Des clients, de tout âge et de toute
profession, (du jeune chef d'entreprise maso de 30ans à l'architecte
allemand de 65ans qui veut apporter du piment dans sa vie de couple) me
contactent depuis un profil (sur Hunqz, voire même Twitter ou Insta).
Après négociation, je les reçois chez moi, ou je me déplace (plus
rarement) chez eux. Il m'arrive même de me déplacer à l'étranger pour de
plus longues sessions.
Ma première approche du SM fût pendant
les orgies queer qu'on organisait sur Marseille. J'y découvrais alors
une sexualité inventive, curieuse, émancipée des normes -un espace
politisé, propice à la parole et à de nouvelles fantasmagories, dans
lequel j'explorais des désirs que j'avais jusqu'alors brimés, sans doute
pour correspondre aux canons d'une sexualité trop centrée sur la
génitalité.
J'ai commencé à exercer la domination dans une
perspective initiatique, d'apprentissage. Ça a été l'occasion de
découvrir de nouveaux partenaires de jeu, et d'affiner ainsi mon rôle et
mes savoir-faire -l'occasion de mieux connaitre mes désirs et mes
limites, de gagner en confiance dans ce rôle de dominant. Quand je vois
un client, je m'applique beaucoup pour être à la hauteur de la confiance
qu'il me cède. Je me sens responsable.
Pourtant, je ne
corresponds pas au canon du mec dominant. Je ne suis pas viril, je ne
suis pas musclé, je suis tout mince et je porte des jupes. La majorité
de mes clients sont bien plus robustes et imposants que moi. Ils
pourraient me dominer physiquement en un claquement de doigt.
Mais la domination semble bien plus complexe qu'une simple panoplie
empruntée à un mauvais porno à la CitéBeur. J'ai déjà travaillé avec un
jeune collègue pour dominer à deux un client, et ça s'est mal passé. Il
ne maîtrisait pas du tout ce qu'il faisait, ils plaçaient mal ses coups,
et sortait des insultes toutes faites pour jouer au mec viril et
vainement essayer de rendre son jeu de domination crédible. On aurait
dit une pièce de théâtre de mauvais goût. Il manquait considérablement
de passion.
Si le SM est bien une forme de jeu, avec un système
de règles, une distribution de rôle défini à l'avance, il peut aussi
amorcer la sincérité d'une relation horizontale, même s'il s'agit d'une
prestation tarifée. A ce titre, je ressens régulièrement de l'émotion
lors d'une session. Les limites entre dominant et soumis sont poreuses,
vibrantes -souvent en tension. D'ailleurs, les rôles peuvent parfois
s'inverser. Hier, par exemple, j'ai vu un client à Marseille, dans un
hôtel de la Corniche Kennedy. Nous avions distribué les rôles à l'avance
: il était le soumis, la "chienne" comme il disait, et j'étais le
maître. Il m'attendait à quatre pattes dans sa chambre.
Malgré la
sévérité du rôle que je devais tenir, à mesure que nous jouions
ensemble, je ressentais de la tendresse, et j'avais secrètement envie de
l'embrasser. Au fond de moi, je désirais que la situation s'inversât
-ce qui aurait évidemment été impossible, car j'étais payé pour me
cantonner à mon rôle.
En ce sens, je trouve que le dominant et le
dominé sont liés ensemble dans une relation d'interdépendance. Après
tout, c'est bien le soumis qui confère au maître la légitimité de son
rôle. Il n'a pas moins de pouvoir.
J'estime énormément les
clients que je rencontre. Je m'applique beaucoup pour les mettre en
confiance, et faire naître une relation. Mon rituel, c'est de commencer
un premier contact corporel par des appositions de main sur les épaules
et la tête, pour faire circuler l'énergie entre nous. Ensuite, j'insère
un doigt, deux doigts, puis tout mon poing dans la bouche de mon client
pour fixer les rôles. Le regard joue beaucoup dans cette approche
introductive. Cette connexion, j'ai besoin de la ressentir pour dominer.
C'est un peu comme si je tombais amoureux, même si ce n'est que pour
une heure.
A ce titre, j'ai une histoire avec certains clients
réguliers, qui me voient comme un point d'équilibre entre leur mec et
leur taff, un peu comme si je faisais parti de leur famille.
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